Vincent Enyeama (Nigéria), un gardien spécial

La série “Légendes de CAN” s’ouvre avec un des meilleurs gardiens africains des vingt dernières années. Fort de ses 5 CAN et ses trois coupes du monde disputées, c’est une des figures emblématiques du football nigérian et africain dans les années 2000 et 2010. Vainqueur de la CAN 2013 avec les Supers Eagles, il a bien entendu sa place parmi les légendes de la compétition dans son ère moderne. 

Près de dix ans après, le Nigéria cherche toujours un digne successeur à Vincent Enyeama au poste de gardien de but. Enyeama, c’est une grosse explosivité, des arrêts spectaculaires sur sa ligne. C’est aussi cette décontraction, ce sourire contagieux. Tout ça fait de lui un personnage attachant. 

Un parcours honorable 

Vincent Enyeama a une carrière relativement atypique. Si son passage en France, à Lille, est le moment où les projecteurs sont braqués sur lui, ce ,n’est pas forcément le Prime de sa carrière. Le Nigérian commence sa carrière au pays, à Ibom Stars entre 1999 et 2001 avant de jouer 4 saisons pour Enyimba, un des plus grands clubs du pays. Il est donc aguerri pour s’expatrier. C’est en Israël, au Bnei Yehoudah FC, qu’il va connaître sa première expérience en Europe. Comme à ses débuts, deux saisons lui ont suffi pour s’adapter à son nouvel environnement avant de faire le grand saut. Il s’engage en 2007 pour l’Hapoël Tel-Aviv, un des plus gros clubs du pays. Après avoir disputé la Coupe UEFA, il découvre cette fois la Ligue des Champions. 

Sa saison 2009-2010 est juste monstrueuse avec 47 matchs disputés. Mieux, il inscrit cette saison-là 9 buts toutes compétitions confondues, un total incroyable pour un gardien de but. Spécialiste des penalties, il a eu l’occasion de se mettre en évidence. Ses performances en club, ajoutées à ses prestations remarquées en Coupe du monde attirent des clubs plus en vue. C’est le Losc, fraîchement champion de France, qui le signe en 2011. Il prend du temps à s’imposer mais va marquer les esprits. Durant la saison 2013-2014, il passe 11 matchs d’affilée sans encaisser de but entre la 6e et la 16e journée de Ligue 1. Le 3 décembre 2013, face à l’OM, après trois minutes de jeu, il approche du record d’invincibilité de Gaëtan Huard en devenant le deuxième gardien le plus invincible en Ligue 1 devant Salvatore Sirigu. Il dépasse dans le même temps la barre symbolique des 1 000 minutes sans encaisser de but. Malheureusement, il n’arrive pas à battre le record absolu. 

Garant de la sérénité des Supers Eagles 

Une des vérités dans le foot de haut niveau, c’est qu’il faut un grand gardien pour remporter des titres. Et lorsqu’on prend l’exemple de la CAN, les vainqueurs durant leurs conquêtes ont pu compter sur des gardiens en état de grâce. Et Vincent Enyeama n’y a pas fait exception en 2013. Mais avant cette consécration sur le plan continental, lui et les Supers Eagles ont longtemps buté. Sur ses 4 premières CAN, lui et le Nigéria ont échoué 3 fois en demi-finale. Sur cette période, on peut retenir l’édition 2010 durant laquelle Enyeama est décisif, notamment en quart. Durant la séance de tirs aux buts face à la Zambie, il arrête un tir et transforme le sien pour permettre à son équipe d’aller en demi. Avec autant d’échecs aux portes de la finale, il faut briser le plafond de verre. Mais lorsque les Supers Eagles se présentent en 2013 en Afrique du Sud, ils ne sont pas forcément de grands favoris.

 Le Nigéria n’était pas présent à la CAN 2012 et la sérénité ne règne pas forcément dans le groupe. Le regretté Stephen Keshi, alors sélectionneur de l’équipe, avait fait des choix forts en laissant de côté des joueurs comme Obafemi Martins et Peter Odemwingie. Des choix qui seront payants. Le Nigéria présente une équipe très équilibrée. Emmanuel Emenike est le buteur, Victor Moses et Obi Mikel sont les joueurs créatifs au milieu avec Sunday Mba. En défense, Efe Ambrose et Joseph Yobo assurent les arrières d’un certain Vincent Enyeama qui entame un second Prime dans sa carrière. Après une phase de groupe poussive, le Nigéria devient intraitable à partir des quarts en éliminant la Côte d’ivoire (2-1) avant d’humilier le Mali en demi (4-1). Le Nigéria remporte la finale (1-0) face au Burkina Faso avec un Enyeama qui sort un arrêt décisif sur la seule vraie occasion des Etalons. Pour l’ensemble de son œuvre durant la compétition, il est retenu dans l’équipe-type.

De la génération “sacrifiée”

L’Afrique a connu de grands gardiens dans les années 2000 et 2010. En plus d’Enyeama, on peut citer des portiers comme le Ghanéen Richards Kingson, le Camerounais Idriss Carlos Kameni ou encore l’Egyptien Essam El Hadary. Mais en dépit de leurs grosses prestations en sélection, notamment en CAN et même à la coupe du monde, leur carrière en club ne s’est pas faite au plus haut niveau européen. Historiquement, le gardien africain n’a jamais vraiment été très prisé par les grands d’Europe. Beaucoup de préjugés, la CAN qui se joue en cours de saison, ont été des freins. On était aussi à une ère où le jeu au pied des gardiens et la taille commençaient à devenir un critère prépondérant. Le niveau de difficulté était encore plus élevé. 

Malgré tout, comme leurs aînés Joseph Antoine Bell, Thomas Nkono, Badou Zaki ou encore Bruce Grobbelaar, Enyeama et les gardiens de sa génération ont contribué à faire évoluer les mentalités en Europe. Si ces dernières années, on a vu des africains comme Edouard Mendy, Yassine Bono et André Onana rivaliser avec les meilleurs à ce poste, c’est aussi grâce à l’héritage de leurs prédécesseurs. Pour toutes ces raisons, Vincent Enyeama et tous les grands gardiens de sa génération méritent du respect.

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