La Ligue des Champions nous a offert une nouvelle soirée mémorable. Le public d’Anfield a été témoin d’un match d’anthologie. Ce qui a commencé comme une démonstration de Liverpool a terminé en une Remontada du Real Madrid. Comme la semaine dernière avec PSG vs Bayern, on revient sur des aspects tactiques du match et plus.
Au fond, le score en lui-même n’est pas si surprenant. Autant les deux clubs ont des atouts offensifs qui font partie des meilleurs du monde, autant derrière, c’est moins solide. On pouvait donc s’attendre à un match ouvert et une pluie de buts. Mais c’est plus le scénario de la rencontre qui est déroutant. Un match qui renseigne assez bien sûr les forces des deux derniers finalistes de la LDC, mais aussi sur leurs errements.
Liverpool à l’image de toute la saison
Pourtant, on a retrouvé quelques bribes du grand Liverpool, que ce soit de l’année dernière, ou plus globalement de l’ère Klopp. Autrement dit, ses fondamentaux, le pressing, le contre-pressing. Mais la différence avec ce qu’ils font cette saison, c’est que c’était mieux coordonné. Chose qui n’a pas duré, mais durant les 20 premières minutes, les mouvements collectifs étaient synchronisés. Un autre maître mot de la philosophie Klopp, l’intensité. C’est un terme peut-être un peu galvaudé, mais mettre de l’intensité dans ce genre de rencontre est une des clés du succès. Les Anglais ont été en mode rouleau-compresseur sur un Real qui apparemment était toujours au vestiaire. Difficile de retrouver une action des Madrilènes qui ressortent le ballon avec du jeu court.
Mais le fait de mener 2-0 aussi rapidement a un peu desservi Liverpool, qui par réflexe a reculé pour gérer son avance et miser sur Salah en contre-attaque. Et c’est dans cette posture que les vieux démons des Reds ont fait leur retour. Le problème de Liverpool cette saison n’est pas forcément tactique, physique ou psychologique… c’est un peu des trois. Chacun des buts est typiquement le genre de buts qu’encaisse Liverpool cette saison ; à commencer par le premier, inscrit par Vinicius Junior. Ils ont beau être regroupés derrière, apparemment bien en place, lorsque l’équipe en face accélère, ils sont défaillants. Ils sont souvent en retard sur les attaques et sur les actions, ça se joue à peu de choses à chaque fois. Il y a peut-être une part de déficit sur le plan physique, mais plus concrètement, la synchronisation qu’il y avait au début a disparu. Les latéraux sont apathiques et Van Djik hésite toujours à attaquer et se contente souvent de mettre son corps en opposition. Sur le quatrième but, ils sont également dépassés dès que Rodrygo et Benzema ont un peu accéléré.
Les erreurs individuelles, c’est également une habitude cette saison. De Virgil Van Djik à Alisson hier soir en passant par Joël Matip, c’est également symptomatique de la saison non seulement de l’équipe, mais aussi celle des joueurs pris individuellement. À souligner une nouvelle erreur sur le cinquième but, au départ de la contre-attaque avec Fabinho qui rate son contrôle.
Les deux visages du Real
Une équipe qui est d’abord à la rue, puis irrésistible par la suite ; c’est l’histoire du Real en Ligue des Champions. Le premier but encaissé illustre le premier visage. Alaba hésite à aller au marquage sur Salah qui a le ballon, ou Henderson qui propose une solution à droite. Rüdiger quitte sa zone pour prêter main-forte, mais pas assez prompt. Les deux joueurs créent un petit espace que Salah exploite pour passer le ballon à Nunez qui passe devant Militao, attentiste, et Carvajal qui avait pourtant l’œil sur l’Uruguayen depuis le départ de l’action. Les déplacements ne sont pas coordonnés et comme la saison dernière, les problèmes défensifs du Real partent des latéraux. Si les difficultés de Carvajal à droite sont visibles, Alaba a également souffert à gauche. Si c’était il y a quelques années l’un des meilleurs du monde à ce poste au Bayern, l’Autrichien n’a plus assez de jus. À présent dans la trentaine, il est meilleur dans l’axe central pour son expérience et sa capacité d’anticipation. Face à la vivacité de Salah, il a été en grande difficulté. Par contre, dès que Nacho est entré, l’Égyptien a été éteint et Eder Militao a été un patron en défense.
On décrit le Real Madrid comme une équipe à réaction dans ce genre de situation, ce qui est vrai. Mais à la différence d’un Manchester City ou le Bayern, ils ne reviennent pas après une si grande métamorphose. La force du Real d’Ancelotti est de revenir aux fondamentaux après s’être fait malmener. La force de l’italien est de faire jouer ses équipes le plus simplement possible en appliquant les bases. Il a suffi que Real se mette à ressortir plus proprement le ballon, à jouer en une touche, à frapper dès que l’occasion se présente pour redevenir conquérant. C’est dans ces conditions que des joueurs comme Modric brillent. Madrid a de grands joueurs, et ce sont eux qui font sortir de l’ordinaire les préceptes. Le fait que Liverpool relâche la pression facilite la tâche au Real. Camavinga livre par la suite une Masterclass le reste du match. Lorsque le Real retrouve le contrôle du milieu, ils sont injouables. Le second visage du Real n’est qu’une version améliorée de la première, avec plus de justesse technique et… d’intensité, une fois de plus. Le pressing bien coordonné, les courses synchronisées, les passes vers l’avant qui accélèrent le jeu et la disponibilité dans le camp pour proposer des solutions, autant d’ingrédients pour mettre de l’intensité et ainsi déséquilibrer l’équipe adverse.